samedi 15 octobre 2011

Baïkal

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Le minibus quitte la place du marché d'Irkoutsk et très vite, file sur l'étroit bandeau d'asphalte qui a été tiré en une parfaite ligne droite entre la capitale régionale et les rives Sud du lac Baïkal, à travers une épaisse taïga, typique de cette région de Sibérie orientale.
C'est donc dans la petite cité lacustre de Listvyanka que nous nous posons trois jours, histoire de souffler un peu, et de récupérer de la fatigue accumulée depuis que nous avons quitté Pékin, en dormant de longues nuits dans le silence sibérien, et en nous délectant des spécialités locales: l'omoul (le poisson du lac) fumé, le pain local à la couleur brune, et le kéfir, cette boisson lactée au goût fort et acide.

Au bout d'un chemin de terre, à l'écart du reste du village, nous nous installons dans un petit chalet entièrement en bois (il faut dire que les arbres ne manquent pas par ici). L'excentrique propriétaire nous explique où vont les 2 chemins qui passent à proximité du chalet.
- Par là, vous rejoignez le lac, par ici, vous passez une montagne et vous trouverez une jolie église et un petit hameau où l'on peut faire du chien de traineau en hiver, et puis si vous continuez par là-bas, au bout de quelques heures, vous devriez tomber nez-à-nez avec un ours.
Nous voici avertis.

Nous farnientons la première journée sur les rives de cette magnifique masse bleue, à la beauté saisissante. Long de plus de 600 km par environ 50, le lac fait une fois et demie la superficie de la Slovénie (vous rendez-vous compte?). Son eau est réputée pour sa pureté, et en hiver, le lac étant entièrement gelé sur 50 à 70 cm, les bateaux sont remplacés par des Jeeps, des Uaz et des camions militaires, qui utilisent alors le lac comme une immense autoroute.
Avec ses 1600 m de profondeur, ce lac contiendrait suffisamment d'eau douce pour abreuver l'humanité entière sur une période de 40 ans... Mais alors, me direz-vous, pourquoi les Russes boivent-ils autant de vodka?

Nous rencontrons les charmantes commerçantes du village. Du jamais vu. Entrez dans un magasin, et vous aurez immédiatement le réflexe de vous excuser d'avoir eu l'audace d'importuner la dame qui était assise au bord de la fenêtre, à attendre désespérément que la journée se termine. Déjà, pour lui faire quitter sa chaise, il faut insister sur le « Zdrastvouytye », salutation locale. Sans vous rendre le bonjour, elle vous regarde inexpressive, glaciale et hermétique. Lorsqu'en plus, elle s'aperçoit que vous ne parlez pas russe, alors là, c'est mort, c'est la fin des haricots. Elle soupire, râle, s'efforce de vous montrer à quel point il lui est pénible d'essayer de vous comprendre. Vous montrez du doigt ce que vous voulez, elle s'évertue à ne pas comprendre. Elle prend un malin plaisir à vous poser, en russe, des questions inutiles auxquelles vous êtes incapable de répondre, vous remettant habilement l'échec de la transaction sur le dos. Se nourrir dans ce patelin est une véritable épreuve, un tour de force. Il faudra vous estimer heureux si vous parvenez à ressortir avec un ou deux filets de poisson, un bout de pain ou quelques grammes de vache-qui-rit locale. Il n'y a pas idée de déranger les gens ainsi... Étrange pays.
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Un matin, nous prenons un bateau qui longe la rive Ouest sur une vingtaine de kilomètres vers le Nord, et nous pose à Boltchykoti, tout petit village de maisonnettes de poupées en bois sombre et aux volets colorés. Le hameau n'est accessible que par le lac ou à pied. L'endroit est absolument charmant. Le temps est superbe. Le vieux side-car vert que l'on a remarqué en descendant du bateau semble être le seul engin motorisé du coin.
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Le lac imprègne l'endroit d'une formidable sérénité. Çà et là, dans les jardins, au bord des chemins ou sur les galets du rivage, des fûts en métal recyclés en fumoirs à omoul enveloppent le village endormi d'un appétissant fumet de poisson. Assises devant leurs maisons, on se demande quels ragots peuvent se raconter les mamies. Les quelques gamins du bled s'amusent dans les épaves de camions de l'armée russe, rouillant au fond d'un jardin. Des vaches sans pâturage fixe, squateuses de maisons abandonnées, nous regardent passer de leur yeux inexpressifs, la tête par la fenêtre de leur todis. Et puis éberlués, depuis des pontons bricolés sur la rive, nous regardons les femmes du village plongeant sans hésitation dans cette eau qui ne doit pas dépasser les 12 degrés. 
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Nous savourons longuement l'ambiance paisible de ce hameau, puis longeons le lac vers le Sud, en direction de Listvyanka.
L'étroit chemin, absolument pas balisé, mais assez visible au début, devient de plus en plus compliqué à pratiquer, nous emmenant souvent au bord de la falaise, 30 mètres à pic au dessus de l'eau, nous faisant risquer de sérieuses chutes. Nous empruntons donc d'autres chemins qui partent davantage à travers les arbres, en remontant la pente abrupte.
Nous mangeons sur la grève et nous ravitaillons régulièrement en eau à même le lac. Ce sont les locaux qui le font. Et c'est vrai qu'elle est bonne, et fraîche.
Au fur et à mesure que nous avançons, le sentier est de moins en moins facile à distinguer. Nous y allons parfois au pif. Au pire, nous suivons le lac, grosso modo. Au bout de 4 ou 5 heures de marche, nous nous enfonçons sérieusement dans la forêt. Comme nous sommes maintenant assez proche de la bruyante civilisation, et que l'endroit est régulièrement pratiqués par des randonneurs, le risque de rencontrer un ours est plutôt faible. En revanche, l'orage qui a menacé tout l'après midi nous tombe dessus. Nous courbons l'échine et filons à travers bois, avec pour seule motivation de se retrouver au sec, sous un toit avec un bon chocolat chaud... Évidemment, nous finissons par nous perdre. Et ne sommes plus en vue du lac. Après avoir rejoint une gigantesque antenne-relai toute rouillée, nous nous retrouvons sur un chemin carrossable et l'empruntons sur quelques kilomètres. Il nous mène à des maisons qui nous remettent sur le bon chemin.
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De retour au chalet, nous nous faisons un gueuletons de coquillettes au concentré de tomate (que nous avons finit par arracher des mains de l'épicière) et refaisons le monde avec les deux Catalans, qui m'en voudraient de dire Espagnols, logeant dans l'autre chambre de cette cabane du fond des bois.
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Lorsque nous quittons le Baïkal, c'est pour monter dans le transsibérien, pour une longue et dernière étape jusqu'à Moscou.
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3 commentaires:

  1. Ben c'est pas joyeux-joyeux, cette fois. Heureusement que la nature est là pour vous consoler des humains, dites-moi !

    J'espère que ce commentaire passera, sinon, ça sera comme d'hab, par mail ....

    Gros bisous à vous !

    La Tata4

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  2. C'est vrai qu'on sent comme un vague parfum de ...poisson fumé... heu, pardon, de coup de blues... Mais n'était-ce pas "obligé", après la magie mongole ?
    Bisous d'Aveyron...
    A&co

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